Nous venons de fêter les 10 ans du jumelage entre les villes de Grenoble et de Ouagadougou. À cette occasion le maire de Ouagadougou, M. Simon Compaoré, a été invité à Grenoble à la tête d’une délégation de 38 personnes parmi lesquelles essentiellement des élus et des proches du maire. En tant que maire de la capitale du Burkina Faso, pays classé parmi les six derniers du monde suivant l’Indice de Développement Humain, Simon Compaoré a pu passer plus de dix jours dans notre ville malgré les problèmes graves que subit sa population durement frappée début septembre par des pluies torrentielles ayant fait des milliers de sans-abris à Ouagadougou même. Le conseil municipal de Grenoble a d’ailleurs voté en septembre une aide de 20 000 € à Ouagadougou, qui est bien peu à la fois au vu des besoins, mais aussi des dépenses engagées pour cet anniversaire. Ces coopérations de ville à ville prennent souvent un tour plus politique que citoyen. C’est aussi le cas pour celle-ci menée avec Ouagadougou, où les dépenses protocolaires de voyage des uns et des autres dépassent largement le budget alloué aux aides directes pour des échanges culturels, sportifs, artistiques ou éducatifs.
Depuis son dernier voyage à Ouagadougou il y a moins d’un an, le maire ne cesse d’ailleurs de répéter la même anecdote. Demandant à un instituteur de Ouaga les besoins des ses élèves, il s’entendit répondre : « Pour pouvoir étudier, mes élèves doivent d’abord manger à leur faim. » Michel Destot, maire d’une ville d’à peine 160 000 habitants a donc pris l’engagement de résoudre les problèmes d’alimentation d’une ville comme Ouagadougou qui compte un million d’habitants de plus ! La dernière annonce qu’il a faite lors des cérémonies il y a huit jours a été de promettre d’y envoyer un élu en charge de la restauration et le directeur du service pour voir ce qu’il est possible de mettre en place… Depuis près d’un an qu’il évoque cette demande, rien n’a été fait, ce qui montre bien que ce n’est pas sur ces bases humanitaires que peut se bâtir une coopération entre deux villes aussi dissemblables.
Nous demandons qu’à l’occasion de ces jumelages des échanges d’habitants soient développés dans les deux sens en impliquant en priorité la population civile et en limitant les voyages d’élus à des rencontres techniques des élus délégués à cette politique de coopération décentralisée et que soient mises en œuvre des actions durables qui favorisent le rapprochement et la paix entre les territoires et les peuples, la compréhension et l’ouverture à des cultures et des savoir-faire différents, source d’enrichissement réciproque et d’innovation. Pour cela, il s’agit de mettre en place des instances citoyennes de suivi et d’évaluation ayant le souci de respecter la transparence des actions, l’information auprès des habitants, l’évaluation par chacun des acteurs des deux territoires disposant d’une voix égale et d’un réel droit de regard et enfin la capitalisation des actions et leur diffusion auprès de tous. On en est loin…